Alors qu’aujourd’hui l’écosystème tech peine à recruter des collaboratrices, et que peu de femmes dirigent des géants de la tech (voire des entreprises tech, tout court), certaines femmes ouvrent la voie, et partagent leurs secrets pour évoluer dans cet univers encore si masculin. Et nous montrent par la même que la diversité des genres est un atout pour les entreprises, et reste actuellement une des priorités RH phares de l’écosystème tech.
Le manque de femmes dans la tech est un secret pour personne. Les chiffres varient un peu selon les sources, mais on estime que 31% des collaborateurs dans la tech sont des femmes : le chiffre se porte à 42% au sein des GAFAM, probablement parce que ces entreprises ont investi tôt dans la problématique de la diversité des genres, via des stratégies RH, notamment en termes de marque employeur).
Certes, le poids des collaboratrices pourrait être encore plus faible, comme dans l’univers des jeunes vidéo par exemple, mais on ne saurait se contenter d’un tel écart, et ce d’autant plus que le secteur de la tech est toujours extrêmement porteur. On ne saurait non plus se contenter du peu de Leaders de sexe féminin, que ce soit dans les GAFAM, dans les multinationales tech ou encore dans l’écosystème des startups et des scale-ups de la fintech, food tech, health tech…
Qu’est ce qui peut donc expliquer qu’un tiers environ des collaborateurs dans la tech soit des femmes ? On ne peut bien sûr pas réduire le problème à une seule cause, car plusieurs raisons sont à blâmer. Le diplôme déjà : la logique est implacable. Plus de jeunes femmes en études signifie plus de jeunes femmes sur le marché du travail, puis dans les entreprises. Si on veut augmenter la présence de femmes dans la tech, il faut convaincre les petites filles que ces parcours sont aussi faits pour elle. C’est d’ailleurs un des combats portés par le GAFAM Amazon, via son programme Amazon Future Engineer, dédié aux jeunes filles et afin de leur faciliter l’accès à EPITA et EPITECH.
Mais le problème ne s’arrête pas là. Outre le faible pool de candidates, les recruteurs et RH d’entreprises tech doivent aussi souvent composer avec des problèmes de rétention de leurs collaboratrices. Les entreprises du secteur multiplient d’ailleurs les initiatives RH afin de réduire cette attrition : congé paternel allongé, plan de carrière pour les retours de congé maternité, crèches, et bien sûr le télétravail.
Autre élément jouant parfois contre les femmes : la culture d’entreprise. Evidemment (et fort heureusement !) de nombreuses entreprises dans la tech promeuvent des valeurs d’entreprise basées sur la diversité, l’équité et l’inclusion. Néanmoins, certaines entreprises ont gardé une culture « masculine », donnant parfois lieu à l’expression de comportements discriminatoires, voire de situations de harcèlement. Une étude de 2017 estimait ainsi que 50% des collaboratrices dans la tech avait un jour été discriminée à cause de leur genre.
Enfin, le secteur souffre d’un vrai problème de représentation : comment se projeter dans une entreprise où toutes les personnes qui nous ont fait passer des entretiens sont des hommes ? Ou la majeure partie de nos collègues sont des hommes ? Ou tous les C-levels sont des hommes (sauf parfois la DRH… excusez du cliché)?
Une fois que l’on s’est dits ça, et qu’on a fait ce triste constat, on peut tout de même se mettre à la recherche d’une lueur d’espoir. Et des lueurs, il y en a plusieurs ! De plus en plus de femmes prennent des postes de Leaders dans la tech, à l’image de Sheryl Sandberg (COO de Meta), ou fondent les pépites tech du moment, comme Mélanie Perkins (fondatrice de Canva). Ecoutons ce que ces femmes ont à nous dire, pour développer notre carrière et s’épanouir dans notre vie professionnelle- et dans la tech.
Première règle d’or à destination des start-uppeuses de la tech : bien s’entourer ! De manière plus explicite, il est important de s’entourer de gens qui croient en nous, et qui ont toute notre confiance, comme le souligne Gina Bianchini de Mighty Network). Alicia Thomas de DIBS mentionne également l’importance de ne pas chercher à être trop scolaire : c’est ok d’être « scrappy », de prendre le temps de faire grandir son entreprise – et comme le dit si bien Mélanie Perkins, de faire grandir ses collaborateurs, et de les aider à dépasser les limites de l’existant.
Reshma Saujani, célèbre avocate américaine, fondatrice de l’organisation à but non lucratif Girls who code, va même plus loin et conseille même de bâcler 10% de son job. Cela semble contre-intuitif pour développer sa carrière, mais le perfectionnisme et l’approche très « scolaire » de certaines collaboratrices sont des ennemis durs à combattre. L’histoire de Whitney Wolfe Herd est quant à elle démonstration par la preuve de la possibilité d’inverser les règles du jeu : harcelée sexuellement chez Tinder, elle a ensuite monté sa propre dating app visant à … inverser les codes de la drague. Bumble était né, et vous connaissez la suite. Et comment ne pas conclure ce panorama de femmes Leaders sans aborder une des pionnières du genre, grande défenseuse du rôle des femmes dans la tech et plus généralement dans le monde professionnel : Sheryl Sandberg, COO de Facebook, puis de Meta, depuis 2008. Auteure du best-seller Lean In (En avant toutes en Français), qui a traîné sur bon nombre de tables de chevet, Sheryl en partageant son expérience nous donne des conseils précieux pour se développer professionnellement. Dans un Ted Talk devenu célèbre, elle nous rappelle que « Done is better than perfect » : une mise en garde encore une fois contre une pensée trop scolaire, car les règles du jeu ne sont pas les mêmes à l’école et dans la vie professionnelle, et que les attitudes trop scolaires sont bien souvent plus nuisibles qu’autre chose. Sortir de son rôle d’écolière et « s’assoir à la table », tel est le conseil phare de Sheryl Sandberg. Elle nous prévient enfin que le succès des femmes influence bien souvent négativement leur « quotient sympathie » : eh oui, au 21ème siècle, on n’aime toujours pas trop les femmes qui réussissent. Comptons donc sur nous-mêmes, et non sur un mentor ou sur un petit ami, et ne laissons personne nous barrer la route.
Au-delà des verbatims de femmes célèbres dans l’écosystème tech, de plus en plus d’études sont réalisées pour comprendre et analyser les facteurs de réussite des femmes dans la tech. On peut par exemple citer l’étude du BCG, qui part d’un constat frappant : un écart de 19 points entre le pourcentage de femmes dans la tech, et celui de femmes dirigeantes dans la tech. Le BCG identifie ainsi plusieurs facteurs de réussite des collaboratrices en entreprise : une première promotion rapide, la possibilité d’exprimer ses opinions librement, et une culture encourageant la prise de risques. Le cabinet partage aussi des conseils en développement professionnel, faisant écho aux découvertes de leur étude : travailler son style de communication, chercher du feedback constructif, apprendre à faire son autopromotion (de manière humble bien sûr), et ne pas avoir peur de se « stretcher » – de prendre ce rôle dont on n’est pas sûres qu’il soit pour nous, ou qui nous fait douter de nos compétences. Une étude du site The Muse apporte d’autres éléments : la recherche d’un ou d’une mentor de qualité, l’importance de toujours continuer à apprendre, de s’entourer de personnes qui nous comprennent (ce qui peut bien entendu passer par des réseaux comme Women in Tech), et bien entendu se positionner sur job qui fasse sens pour nous, et qui nous motive.
Vous l’avez compris, tout le monde tombe d’accord pour dire qu’il faut booster la diversité de genre dans la tech. Cela fait écho aux principes de diversité et d’inclusion que l’on retrouve dans de nombreuses entreprises bien sûr, mais pas seulement. La diversité des genres en entreprise est également un facteur de performance accrue pour l’entreprise, et ce n’est pas n’importe qui qui nous le dit : McKinsey et HBR arrivent à la même conclusion : recruter des collaboratrices, c’esr bon pour le business. Ainsi, McKinsey nous montre que les entreprises avec plus de 30% de femmes à des postes de dirigeants vont mieux performer de 10 à 30% versus les autres acteurs en présence. HBR met aussi en avant des chiffres édifiants : les équipes diverses prennent des décisions deux fois plus vite en réunion, et ont 1,3 fois plus de chances que les autres d’innover. Soutenir les jeunes femmes dans leur désir de carrière dans la tech d’abord, puis de progresser jusqu’à des postes de dirigeantes est essentiel (si le cœur leur en dit bien sûr, tout le monde n’a pas vocation à être une Mélanie Perkins ou une Sheryl Sandberg). Acquérir et retenir les collaboratrices dans la tech est donc un des défis centraux des politiques RH actuelles dans ce secteur.
Et pour conclure, rien de mieux que de rappeler que l’enjeu de diversité et d’inclusion est l’affaire de toutes et tous comme le souligne Technopedia. Managers, formez et promouvez vos collaboratrices. Donnez-leur suffisamment de flexibilité pour mener de front leurs ambitions professionnelles et personnelles. Proposez des offres d’emploi et des processus de recrutement inclusifs, et investissez si besoin dans des formations visant à sensibiliser sur les biais inconscients. Et enfin, prenez le temps de parler à vos collaboratrices : les initiatives les plus pertinentes seront toujours celles qui répondent aux besoins actuels des femmes qui constituent déjà votre organisation.
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